Les accessoires de la dictature
|
|
|
Une
dictature ne se dévoile jamais, elle n’agit qu’en face cachée Pour pouvoir
continuer à exister. Jamais la violence brute n’est plus instaurée en mode
de gouvernement pour diriger des sociétés. Les contraintes et la force
d’oppression qu’exercent certains gouvernements aujourd’hui sur leurs
sociétés sont toujours justifiées par des considérations supérieures dans
l’intérêt du pays, minimisés et proposés comme limités dans le temps. Nous
savons et l’histoire conjuguée à notre propre expérience nous apprend qu’une
dictature quand elle s’empare d’un pays ne lâche jamais. La raison de cet
essai et de chercher à comprendre les secrets qui permettent au
totalitarisme de se maintenir aussi longtemps et comment le dépasser.
Les
mécanismes des dictatures et leurs outils de fonctionnement sont des thèmes
courants de débats et d’explications depuis longtemps dévoilés et largement
diffusés dont le texte ne gagne rien à être chargé. Il serait aussi utile
d’évacuer les considérations morales sur un tel système dans une démarche de
réflexion qui n’a pas pour objet d’attiser les passions par la dénonciation
mais d’évaluer un état concret d’équilibre des forces dans une société
déterminée comme La Tunisie aujourd’hui.
Tant que l’Etat de droit
ne s’est pas définitivement installée, que la loi n’a pas gagnée totalement
sa pérennité et que la société n’a pas évoluée pour donner à un tel système
les institutions capables de lui permettre la possibilité de s’instaurer la
politique sera réduite à la gestion par la violence de la société pour
arbitrer les intérêts contradictoires qui la traversaient au profit de ceux
qui dominaient. Les discours et les idéologies ne sont que les supports de
justification de l’exercice de la violence contre la société que donne le
privilège de détenir le pouvoir pour l’exploiter.
La violence peut
s’exprimer différemment selon la nature de la situation. Dans une situation
de contestation la violence ne s’exerce plus de la même façon que face à une
société pacifiée. L’illusion qu’une dictature peut céder par altruisme ou
par concession aux véritables intérêts de la société est un contre sens qui
dépasse l’entendement de la logique de cet essai. Les situations concrètes
connues prouvent par contre que le totalitarisme peut être dépassé. La
violence constitue elle une alternative d’émancipation et de dépassement
d’une situation de domination ?
Les plus grandes
dictatures qui ont succombés au cours du siècle dernier nous enseignent que
l’opposition par la violence n’été pas l’élément déterminant dans leur
écroulement. Du Portugal à l’Espagne, de
la Pologne
à
la Russie
jusqu’en Roumanie pour ne cité que ces exemples d’école les dictatures se
sont révélés des systèmes fragiles qui ont demandés plus de conscience et de
détermination que de force et de violence pour être démontés. Les pays qui
ont connues de véritables révolution contre les dictatures qu’ils ont subies
n’ont pas mieux réussi à les dépasser l’exemple Iranien, Yougoslave et
Algérien entre autres plus proches et plus récents dans certains pays
Africains corroborent l’idée qu’on ne peut pas passer à la rationalité dans
la gestion des sociétés par l’agitation et l’exacerbation des passions.
La thèse complètement
opposée veut nous convaincre que la dictature peut s’auto transformer et
évoluer de façon autonome vers une démocratie et un état de droit digne de
ce nom. « Théorie des petits pas ou démocratie par goutte à goutte » Les
vertus de cette voie sont défendues par une large frange de l’élite dite
modérée qui s’agite autour du pouvoir aujourd’hui plus paniqué que lui de la
crise qu’il traversait. Une certaine gauche convertie aux vertus du « Bourguibisme »
se fait la porte parole de cette logique de régression. Elle vise à
dépouiller le pouvoir actuel de cet héritage et la légitimité historique qui
s’en suivait. Certain islamistes aussi pensent qu’une dictature affaiblie
doit être ménagé et peut être plus facile à manœuvrer pour lui imposer des
concessions. A l’étranger certaines puissances des plus influentes et les
plus attachés par des rapport d’intérêts avec notre pays agitent
publiquement leurs intentions de faire usage de tous leurs pressions pour
amener « une dictature amie » à procéder à des réformes nécessaires à
l’instauration de la démocratie dans le pays.
Ceux qui veulent croire
en cette solution, par calcul ou par lâcheté devant le devoir de mener une
confrontation de dignité ou par économie de s’investir sans contrepartie
pour leur pays, comme ceux qui par opportunité partant de la conviction que
cette voie les propulse aux premiers plans qu’il n’auront jamais atteint
autrement pour contribuer à cette auto transformation n’apportent rien en
cherchant à se proclamer opposants.
Ceux qui ont misés sur
les bonnes intentions des dictateurs en crise de gestion ne sont pas à leur
premier échec prés. Comme ceux qui se sont engagés à hypothéquer le destin
de tout un pays sur la confiance aveugle en de simples déclarations sont
aujourd’hui au constat du désastre du bilan que ça nous a ramené. Cette
solution n’a jamais réussi sauf à soumettre le pays à la tutelle de étranger
ce qui revient à un régime de protectorat dont notre pays conserve l’amère
expérience passée et ne nous cache plus la façon détournée avec laquelle
elle continue de s’exercer.
Le pire qui peut arriver
à une dictature est d’être remise en question publiquement comme un régime
d’oppression qui demande à être évacuer pour libérer toute une société. Ce
débat est le révélateur de sa véritable nature qu’elle ne peut jamais
supporter. Elle cherche à tout prix à l’occulter, à le marginaliser, à le
faire taire et à le faire oublier. La dictature a besoin de faux débats, de
détourner le centre d’intérêt de la société de toute rationalité en
l’engageant dans des discussions passionnées sur l’identité, la religion et
le patriotisme face aux menaces de l’étranger et la défense de la société
face au terrorisme qui menace la paix. Ces palliatifs de perdition exacerbe
les différends et joue le rôle d’écran de fumée devant toute possibilité de
prise de conscience de chaque individu de sa citoyenneté. La dictature
reprend ainsi le dessus sur la société désunie dont elle reprend sa
représentation comme le seul élément fédérateur et trait d’union se ses
différentes composantes en contradiction. La dictature tire ainsi sa
légitimité et justifie son système d’oppression et justifie sa domination
par le rôle de tutelle sur le pays « en voie de développement » auquel elle
cherche à s’élever pour s’affranchir de toute responsabilité ou devoir de
rendre compte de sa gestion à la société.
Cette quête d’imposer
des préalables à toute définition de la citoyenneté exclue de facto toute
diversité et empêche la véritable expression libre de l’individu et s’oppose
à l’exercice effectif souverain de ses droits dont le premier desquels est
la possibilité de choisir les responsable de son pays et de les tenir dans
les limites de leurs responsabilités. Les dénigrements croisés font de
l’individu un être de carence, suspect dans son identité, dans sa religion,
dans son patriotisme, dans sa capacité d’assimiler la modernité et dans son
droit d’être reconnu indépendant dans sa conscience et ses convictions.
C’est d’un individu sous tutelle ou dominé que la dictature à besoin et
c’est ainsi qu’elle parvient à façonner toute une société. La démocratie
qu’une dictature peut tolérer ne peut dépasser ce niveau de fractures qui
font qu’elle restera toujours le seul arbitre à bord.
La défaite de l’homme
est le générateur de survie de tout système d’oppression et de cette défaite
la dictature vie et continuera à vivre pour longtemps. La dictature corrompt
intellectuellement l’homme contraint de s’insérer dans ses catégories et il
n’a que l’embarra du choix sauf un qui n’existe pas et ne devra jamais
exister celui des hommes libres qui ne pourra jamais être toléré. Avant les
homme de cette espèce ont les fait exécuter et lyncher publiquement.
Le seul débat qui peut
s’instaurer et accommoder une dictature est ainsi un débat de démagogie et
des lutte de passions exacerbe autour de la religion de la race et de
l’identité produisant un discours oratoire d’excitation ou les plus bêtes et
insignifiant sont les plus criant et trouve le plus grand espace pour
propager leurs folies pour contribuer à dérouter et finir par désabuser la
société pour la conduire à l’abandon complet.
Chaque système a son
propre champ de valeurs son éthique et sa morale appropriée. La dictature
est un système qui ne manque pas d’avoir le sien. Les mécanismes de
l’intelligence humaine ne manque pas de moyens pour permettre à chaque
individu de le deviner. Il va de sa survie de s’adapter de décoder le
message que la dictature lui transmet, et son message est clair et direct
pour ceux qui ne l’entendent pas. Elle veut le dominer. On n’a pas à
s’étaler sur le genre des réactions que l’individu est amener à présenter.
La dictature ne lui laisse guère la choix entre l’abdication ou l’abandon.
Vendre l’âme et négocier ses intérêts sur le compte de sa dignité ou choisir
la démission, la marginalisation dans le dégoût et la médiocrité. Dans les
deux cas l’homme sort perdant, dépendant ou impuissant la notion de liberté
ne peut plus être pour lui qu’une fiction.
Le choix de l’abandon
n’est jamais une expression de liberté. Dans une dictature la lutte pour
être repêché au service de l’autorité et devenir parmi ses protégés n’est
pas une opportunité dont tout le monde peut avoir l’occasion. Un système de
minorité ou les place sont limités et âprement disputés la société n’est
qu’un vaste dépotoir de déchets humain volontairement abandonné. Pour la
majorité vivre cette situation est une humiliation de plus et la preuve de
leur inutilité. La dictature ne manquera jamais de candidats au
recrutement ; penser autrement c’est prendre ses rêves pour des réalités.
L’aliénation est la
notion clef pour comprendre tout le système qu’on cherche à dépasser seuls
ceux qui ont dépassés ce stade de mutilation intellectuelle et morale
peuvent contribuer à l’ébauche d’une autre alternative à ce blocage de leurs
société.
Retour
à la théorie de l’émancipation |
Au milieu du siècle
dernier la Tunisie a vu la parution presque simultanée de deux œuvres
majeurs qui sont venues apporter une véritable théorie de la décolonisation
Frantz Fanon avec ses « damnés de la terre » et Albert Memmi avec son
« portrait de colonisé » ont donnés un coup fatal au système colonial dont
il ne va plus se relever. La guerre d’Algérie est venu immédiatement après
confirmer la vois sans issu dans laquelle le colonialisme vient d’être
réduit. Ainsi d’immenses parties du monde colonisé ont pu recouvrir leur
indépendance dans la précipitation au bout de quelques années. Mais
l’émancipation totale de ces peuples opprimés que les deux auteurs ont
prédit ne s’est pas concrétisée dans les faits. La domination extérieure n’a
fait que céder la relève à une domination intérieure aussi cynique et aussi
arbitraire que la première dont elle n’a jamais coupé le cordant ombilical
par lequel elles sont restés attachées. Protectrices et nourricières des
dictatures imposées les anciennes métropoles sont aujourd’hui face à un
dilemme particulier.
L’esclave ne devient pas
libre du simple fait d’avoir été affranchi. La liberté est un statut auquel
ne peuvent accéder que ceux qui ont réussi à s’élever de leur aliénation
initiale accédant à un statut de conscience supérieure si non ils ne sont
que des esclaves libérés. Selon la formule de Hegel « La conscience de soi
et pour soi, quand et parce qu’elle est en soi et pour soi pour une autre
conscience de soi ; c’est à dire qu’elle n’est qu’en tant qu’être
reconnue. »
Tant que l’homme n’a pas
entrepris de se libérer lui-même il ne fait que continuer d’imiter son
maître ; tant que subsiste la fixation au maître il ne peut se tourner vers
le monde en être libre. Fanon disait : « le noir est un esclave à qui on a
permis d’adopter une attitude du maître …» (198) A. Memmi transposait cette
idée sur son portrait du colonisé dans sa lecture du contexte colonial dans
son introduction de 1966 il conclut qu’il suffisait de décrire avec
précision le fait colonial pour mettre en évidence l’inquiété absolue de la
colonisation et, du coup, en dévoiler l’instabilité fondamentale et en
prédire la fin. C’est Jean Paul Sartre qui résuma le mécanisme de déchéance
de tout système d’oppression et qui les conduise inexorablement vers l’auto
décomposition en se posant la question : comment peut elle fonder ses
privilégiés, cette élite d’usurpateurs conscients de leurs médiocrité ? Un
seul moyen : abaisser le colonisé pour se grandir, refuser la qualité
d’homme aux indigènes, les définir comme de simples privations. L’oppression
se justifier par elle-même : les oppresseurs produisent et maintiennent de
force les maux qui rendent à leurs yeux l’opprimé de plus en plus semblable
à ce qu’il faudrait qu’il fut pour mériter son sort.
Je ne pense pas que la
théorie de l’aliénation s’applique à un système de domination plus tôt qu’à
un autre qu’il s’agit d’esclavagisme de colonisation ou de despotisme comme
celui qu’on est entrain de subir en Tunisie. Les schémas sont semblables, le
rapport domination/oppression réduit ses deux pôles en des êtres de carence
piégés dans une situation de blocage dont l’essence même est né de la germe
de sa fin qui ne peut être qu’une confrontation totale et générale seul
apte à libérer les deux parties des carences dont ils se sont réduit. Pour
passer du statut du genre humain à l’homme reconnu dans sa spécificité nous
ne pouvons faire l’économie de notre Combat à mener et qui mène vers la
liberté.
Les
accessoires de la dictature |
Le besoin de définir une
ligne de démarcation de la dictature est primordial et indispensable à tout
mouvement qui lutte pour la démocratie et œuvre pour une véritable
émancipation du pays. Il y a une différence de logique entre ceux qui
luttent pour prendre le pouvoir et ceux qui cherche à changer le système
totalitaire. Les premier ont besoin du pouvoir pour changer la société et
les second ont besoin de changer le système pour la laisser la société
s’autodéterminer. Les premiers négocies avec la dictature leurs propres
statuts et les marges d’activités qu’elle veut leurs tolérer et les derniers
lui nient toute légitimité et ne lui laisse à négocier que son départ. Les
premiers s’adresse à l’autorité et cherche à se conformer à ses critères et
les derniers s’adressent à la société et ne se déterminent que par apport à
ses intérêts.
Ainsi nous avons besoin
de prendre conscience de la nature de notre situation, des contours des
véritables forces en opposition et des véritables enjeux de la question
démocratique dans notre pays. Le système totalitaire est plus large que les
forces représentées au pouvoir. Il comprend aussi tout ceux qui considèrent
leur intégration ou la reconnaissance de leurs partis et de leurs
associations suffisantes à transformer une dictature en démocratie.
« Une si douce
dictature » sophistiquée du début du troisième millénaire ne peut survivre
aussi longtemps si elle n’été un système hautement élaboré pour affronter
tous les défis de la modernité. Il serait naïf d’oublier l’énormité,
l’importance et la nature des intérêts que ce système a été bâti pour les
garder et les protéger de toute revendication égalitaire. Comme il est
illusoire d’espérer une justice d’un système bâti sur l’arbitraire. La
transparence et l’indépendance des institutions et la séparation des
pouvoirs ne peuvent pas aussi être attendu d’un système basé sur la
falsification des élections et le refus de toute véritable souveraineté
populaire. Ce n’est qu’en se déterminant clairement par apport aux
véritables besoins démocratique de notre pays qu’on peut déterminer la bonne
politique qui peut conduire à son émancipation.
Pour pouvoir dépasser un
système totalitaire séculaire ceux qui veulent assumer cette responsabilité
ont besoin de se libérer des fixations par lesquels ils sont toujours tenus
dominés. Un système d’oppression ne donne jamais de concessions que pour
conforter sa position. Ces misérables concessions qui peuvent flatter notre
ego de militant ne sont jamais à la mesure de nos ambitions comme ils
l’aident à soigner son image et à tromper sur sa réalité. Alors que nous
risquons à tout moment à être réduit à des impuissants accessoires de la
dictature.
Yahyaoui Mokhtar
- Tunis : 17 04 2004 |